Melody ▬ My face is shaped like a face, my body like a body, but my thoughts are very unusual.

couleur des yeux — Bleus ; couleur des cheveux — Blonds ; taille — 1m60 ; poids — 53 kg ; tatouages ou piercings — Aucun ; cicatrices — Aucune ; style vestimentaire — Diverses robes, souvent bleues.

      Nom du pouvoir — Hypersensibilité de l'ouïe.
      Description du pouvoir — Elle entend mieux que la moyenne. Beaucoup mieux. D'une façon presque effrayante, surnaturelle. Les chuchotements s'apparentent à des paroles tangibles, les paroles tangibles à des cris. Elle détecte voix, pas et autres bruits terrestres à quelques mètres de plus qu'un autre être de son espèce. En contrepartie, le monde entier est un perpétuel brouhaha sonore pour elle. Il est difficile pour Melody de sortir aux heures de pointe, ce qui la pousse à traîner avec elle une coquille insonorisante. Lorsqu'elle est submergée par la stimulation auditive, il lui arrive de faire des crises de colère, de détresse ou de panique. L'objet lui permet de les éviter lorsqu'elle les anticipe.
     

Melody est particulière. Melody est décalée du monde, perdue dans son univers. Comme une enfant introvertie.

Conséquence de son pouvoir ou simple étrangeté, la jeune femme vit les perceptions captées par chacun de ses sens d'une façon qui lui est propre. La demoiselle déteste être touchée. La sensation d'un contact étranger sur sa peau déclenche dans tout son être une alerte de détresse. Il est plus simple pour elle d'appréhender le monde un sens à la fois, ce qui fait qu'elle ne sent plus que cela. Effrayant, à ses yeux.

Lorsqu'elle observe le monde autour d'elle, elle remarque les détails avant l'ensemble. Remarque les arbres de façon distincte plutôt que la forêt elle-même. Il peut lui arriver de bloquer sur un détail qui l'empêchera d'évaluer une situation, ou même d'écouter son interlocuteur. De ne se souvenir que de son grain de beauté au-dessus de la lèvre, du côté droit, mais d'oublier son prénom. De devoir déplacer le verre d'eau qui se retrouve sur la table pour ne pas cacher son visage afin de l'écouter.

Elle adore l'odeur des livres, abhorre celle de l'essence. Elle ne mange que des aliments ayant un minimum de goût sucré et évitera les oignons, le vinaigre et tout ce qui lui paraît fort.

Dans ses plats, elle commence toujours par manger les légumes -ceux ayant un goût sucré à la cuisson, les autres étant vulgairement délaissés-, puis l'accompagnement et finalement la viande.

Elle est particulière, Melody, oui.

Elle est curieuse, fascinée par la race humaine et sa psychologie, mais ne sait pas comment agir en sa présence. Elle comprend mal les concepts et règles de politesse, abstraits pour elle. Dire merci à une serveuse, alors qu'elle fait son travail, lui paraît étrange, par exemple. Elle l'a acquis parce qu'enfant on lui demandait de le faire.

Ces incompréhensions créent diverses situations plus ou moins amusantes. Par exemple, passionnée par les livres et l'astrologie, elle pourra vous aborder sans dire bonjour, mais en parlant en profondeur des actualités des astres. Ou du dernier livre sur lequel elle travaille. Elle aurait même quelques souvenirs du monde des Étoiles, mais n'en a jamais parlé et se contente de sujets assez théoriques. Pourtant, avec le temps, elle développe ses capacités sociales et arrive peu à peu à entrer en relation avec les êtres qui l'entourent.

Elle apprend aussi à associer les expressions faciales à des sentiments. Sentiments, qui, pour elle, sont difficiles à comprendre et à deviner. Trop abstraits sans illustration directe.

Elle est particulière Melody. Elle racontera sans problème chaque détail de sa dernière appréciation cinématographique, mais prendra littéralement vos jeux de mots. Elle résoudra des algorithmes mathématiques, mais croira que vous êtes triste en voyant vos larmes de joie. Elle peut monologuer pendant des heures sur les sujets qui l'intéressent ; psychologie, littérature et astrologie, mais sera distraite le temps de le dire si vous lui parlez de la pluie et du beau temps.

12 ans plus tôt.

La communication. Ce concept, inné chez la plupart des êtres vivants, semblait inexistant chez elle, lorsqu'Adel avait adoptée la petite Melody. Veuf, voyageur et documentariste plein de ressources, désormais parent, il avait entendu parlé de cas particuliers, de troubles neurologiques où les situations étaient semblables. Avec la détermination d'un père déjà protecteur, il s'était soufflé une promesse sous les étoiles. Il s'en occuperait lui-même. Jamais il ne l'abandonnerait. Jamais on ne la marginaliserait. Sa vie serait un havre de paix dans un monde de tempêtes.

Il l'avait rencontrée suite à la panoplie de démarches, de traces griffonnées sur des feuilles noircies qu'il avait faites durant plusieurs mois. Environ un an après le décès de sa femme. Les souvenirs restaient, mais la solitude pesait, pour un homme ayant toujours eu des projets à l'égard d'une progéniture rêvée. Il en avait discuté autour de lui, à peine sorti des méandres de son deuil, encore un peu hébété par les événements qui avaient défilé à vitesse inégale. Des jours insupportables et lents. D'autres courts, alors qu'il était perdu dans un état second, comme assommé par ses émotions. La majorité l'avait encouragé, sa vie étant revenue à la normale, son humeur suivant peu à peu.

C'était donc ainsi que l'homme s'était retrouvé face à cette enfant, lui avait fait découvrir sa nouvelle maison, sa nouvelle chambre. Et avait eu un aperçu de sa personnalité. À son arrivée dans la demeure, la gamine avait observé son environnement, puis s'était emparée d'un livre, qu'elle avait serré contre elle avant de se recroqueviller dans un coin de sa nouvelle chambre, se balançant d'avant en arrière nerveusement.

Sur la couverture, trois mots, un titre sur le vieux papier ; Le petit prince.
Un livre qu'on lui lisait souvent à l'orphelinat. La seule chose familière dans son nouvel environnement. La seule chose rassurante.

Il lui avait fallu trois heures pour la convaincre de quitter sa chambre et un chocolat chaud. Lorsqu'elle avait entendu ces mots, elle s'était tourné vers lui et avait accepté de se rendre à la cuisine.
Elle avait amené le livre avec elle.
La clameur du soir, des travailleurs se rendant à la maison, s'était tue, laissant flotter une douce accalmie.

Il leur avait fallu un an pour s'apprivoiser.
Tous les autres pour apprendre à Melody à apprivoiser les relations humaines. Heureusement que ces derniers la fascinaient.
Suite à ses crises lorsque le monde autour d'elle était trop bruyant, Adel lui avait procuré une paire de coquilles insonorisantes et elle s'était mise à les transporter toujours sur elle. À l'école, à la maison, lors de sorties...

1 an plus tôt.

- Melody, ma grande, tu te souviens ?
- Dans six mois, le Japon.

Planifier, anticiper, réduire les surprises. C'était ce qu'Adel avait appris à faire pour éviter les crises de Melody. Malgré tout, à son âge, elle savait désormais se maîtriser elle-même, à remplacer les hurlements par des gestes familiers, apaisants. C'était parce qu'il avait vu son cheminement, chacun de ses pas faits au cours de leurs années communes qu'il s'était permis de reprendre ses voyages professionnels. Un documentaire sur le Japon, contrat qui lui permettrait de survivre et de payer les études de sa fille. Endroit où il comptait s'établir un petit moment, vu l'enthousiasme de celle-ci et son propre désir de changement, de recherche d'un nouveau film ou d'un nouveau travail temporaire à réaliser, une fois celui-ci terminé.

Enthousiasme n'était d'ailleurs pas le mot. Elle se disait elle-même attirée comme un aimant par le pays, par la ville où ils iraient s'établir. Habitué à Melody, toujours perdue dans son monde au cœur duquel son imagination maîtrisait tout, il n'avait été ni surpris ni préoccupé. Pas plus qu'il ne l'était par les piles de cahiers à croquis et à scénarios qui s'entassaient peu à peu dans sa chambre, depuis son plus jeune âge.

Six mois. Il avait songé plusieurs fois qu'il était peut-être un peu tôt pour lui en parler. Mais, un si grand changement devait être anticipé longuement. Au moins, elle aurait amplement le temps de se préparer à l'idée et d'éviter la majorité des imprévus.

Aujourd'hui.

Six mois étaient passés depuis leur arrivée au Japon, à Hoshikami.
Adel était rassuré, fier, étonné, de sa fille, qui, malgré les nombreux changements s'était assez bien adaptée.
Elle suivait ses cours dans lesquels elle excellait. En particulier ceux touchant la littérature. Et, passionnée d'astrologie, elle adorait son cours sur les étoiles. Bien sûr, il la voyait moins souvent, puisqu'elle était hébergée à l'académie elle-même, mais, quand elle lui rendait visite, elle lui parlait de son calendrier lui permettant d'anticiper les événements, de sa façon de se préparer comme lui l'avait préparée durant sa jeunesse. Il était rassuré.

Melody, elle, tolérait bien sa nouvelle vie. Elle s'était créée ses propres routines, pouvant s'adapter à divers imprévus grâce à des variables. Ses coquilles ne la quittaient toujours pas, même si elle savait désormais que son point faible était aussi le don que lui avait offert sa Reine, avant qu'elle ne tombe sur terre.

L'adolescente avait découvert la ville et ses habitants et, pour une fois, se sentait un peu plus chez elle, du peu que ce sentiment soit possible pour elle. Le vague appel qu'elle ressentait au fond de ses entrailles lui paraissait plus puissant, mais la demoiselle savait déjà qu'elle se rapprochait du but étrange qu'on lui avait donné.

Elle n'avait pas spécialement envie de socialiser avec cet Inconnu. Mais sa curiosité, sur son identité sur son psyché, prenait le dessus. Même si ce lien prenait parfois des allures de contrainte à ses yeux, plus elle y réfléchissait. Pourtant, contrairement à certains clans rôdant dans les rues de la ville, Melody demeurait neutre. Même si, comme pour toute activité des étoiles ou des hommes, elle était intriguée par l'avis des uns et des autres.

Pour l'instant, elle se contentait de rechercher cette Âme perdue.