[Clos]❝ I used to hate you so easily. Look into your eyes so eagerly. And whether is cold. I wouldn't walk away. ⚔ Hǔ Li

Un flingue pointé sur lui, ce n’était pas la première fois qu’il en avait un. C’était même quelque chose d’assez habituel, routinier, qui ne lui donnait même plus de frissons comme la première fois que cela lui était arrivé. Non pas qu’il se réveillait tous les matins avec une arme contre la tempe, mais vous savez, quand on traîne dans des trucs pas nets, ce n’est pas rare de se retrouver en situation de crise.

Il l’avait vue arriver, la fille aux cheveux bleus qui était en train de le menacer de son arme. En même temps, une crinière d’un telle couleur se détachait facilement des murs noircis de la rue dans laquelle il se trouvait. Sur le coup, il n’avait pas pensé qu’elle aurait pu être flic, ah si seulement il l’avait un peu mieux détaillée il aurait sûrement remarqué le pistolet qui l’accompagnait. « Arrête-toi ! Je suis de la division anti-crépusculaire, ne fait plus un geste Hǔ Li ! » Aaaah, sérieusement. Il venait de se foutre dans un beau mxrdier.

Parmi tous les poulets Japonais, cette division était la pire. Enfin, pour Hǔ en tout cas. Ils savaient mieux que personne qui il était, et il se disait qu’ils avaient probablement placardé des photos de lui partout dans leurs bureaux, histoire que tout le monde, même les bleus, impriment bien son doux visage dans leurs petites têtes. Alors oui, il savait qu’ils étaient dans le coin, mais si les infos qu’il avait reçues avaient été véridiques, alors cette poulette n’avait rien à faire ici. Quelqu’un allait se faire virer ce soir.

Lentement, il leva les mains. Histoire d’éviter de tenter le diable, elle n’avait pas l’air très sûre d’elle la petite, il avait peur qu’une balle lui échappe s’il faisait un geste impromptu. La suite, il improviserait, mais il n’allait sûrement pas se laisser avoir par une demoiselle. « Je... Je suis ton étoile... » Il leva un sourcil et bougea les mains dans un air de « wtf ? » se demandant sérieusement ce qu’elle venait de lui pondre, là.

Le plus drôle dans la situation actuelle, c’est qu’elle-même ne semblait pas savoir ce qu’elle venait de dire. Le tigre pencha légèrement la tête, c’était à ne plus rien y comprendre. Ou peut-être était-ce un plan tout préparé par la division anti-lui. Il imaginait bien la réunion qui avait eu lieu juste avant leur déploiement, où un chef un peu trop nourri aux donuts serait arrivé en clamant avoir une idée révolutionnaire pour chopper la terrible monstruosité humaine sévissant sur la ville : « Que le premier qui lui tombe dessus lui dise « Je suis ton étoile ! » ça va l’amadouer les gars, c’est obligé. » Quelle belle bande d’abrutis. Pourtant ils en savaient assez sur le Chinois pour savoir qu’être amadoué, ce n’est pas son genre.

Une voix s’éleva, qui cria un nom, probablement celui de la flic, vu sa réaction. Et meeerxe, le reste de la meute. Fait comme un rat, se trouvait-il. Au final, leur technique « dis lui que t’es son étoile » avait fonctionné, vu que ça lui avait demandé de réfléchir quelques secondes, précieuses secondes qu’il aurait pu utiliser pour se barrer. Et après on lui demande encore pourquoi il ne réfléchit pas plus souvent ? Ceci est la réponse, quand il réfléchit, ça se finit toujours mal.

« Cache-toi !! » lui avait dit son « interlocutrice », en lui faisant comprendre physiquement qu’il devait dégager le plus vite possible. Cette fois-ci, pas de place à la réflexion. Aussi illogique que cela paraissait, il fallait bien dire qu’il n’avait pas envie de rester planter là et de se retrouver avec tout un régiment armé sur lui tombant dessus. Alors il se mit à courir, pas comme s’il avait vraiment d’autres choix. Il n’aimait pas courir, c'était comme avouer être une proie, alors que c’était lui le prédateur. Tant pis, pour une fois il se résignerait à admettre que dans ce cas précis, il était celui qui était en bas de la chaîne élémentaire.

Il tourna dans deux ruelles puis, remarquant qu’il n’avait aucune idée d’où il était – facilement perdu hein – il préféra s’arrêter dans le creux d’une corniche qui abritait une porte déjà entrouverte ouvrant sûrement sur un repaire de junkie. Il n’aurait qu’à s’y inviter s’il entendait touet une troupe arriver en courant.

Le reste, il improviserait.

Un type avait ouvert la porte à un moment. Il avait toisé Hǔ quelques secondes puis était reparti de là où il venait en se grattant les bras et grognant. Le chinois ne voulait même pas imaginer le genre de substances qui devaient circuler dans le bâtiment qu’il avait choisi comme refuge. Appuyé contre son mur, il guettait attentivement le moindre bruit de pas, prêt à s’engouffrer dans le bâtiment à la moindre suspicion – bâtiment qui avait des relents de moisissures d’ailleurs, maintenant qu’il avait la joie d’en respirer pleinement l’air. Dans un élan de survie, il rabattit la porte vers lui, la laissant juste assez ouverte pour qu’il ne se retrouve pas coincé à l’extérieur en cas d’urgence.

Combien de temps avait-il passé à essayer d’entendre une basse-cour entière se diriger vers lui ? Quelques minutes, tout au plus. Et il en avait déjà marre. Il se disait que de toute façon, s’ils avaient eu à le retrouver, ils l’auraient déjà fait. Il n’avait pas beaucoup d’estime pour les flics, mais il savait tout de même qu’ils n’étaient pas aussi lents. Au moment où il allait se décoller de son mur, la fille aux cheveux bleus apparu dans son champ de vision. D’instinct, il poussa la porte du bâtiment, prêt à se faufiler dans l’ouverture.

« J'ai donné une fausse indication... Ils sont partit de l'autre côté... » Cette phrase bloqua le tigre pour quelques milli-secondes. Elle était sérieuse ? Ou cela faisait-il encore partie du « plan » ? Il regarda à droite et à gauche, incapable de faire confiance à la parole d’une telle personne. Si ce qu’elle avait dit plus tôt était véridique, alors en plus de faire partie du groupe de personnes qui voulaient lui faire la peau, c’était une étoile. Et encore une fois, si ce qu’elle disait était véridiquement véridique, c’était son étoile. Ahah, non. S’il vous plait, non.

Et la voilà qui se lançait dans une espèce de mini-monologue dans lequel elle semblait s’interroger sur la cruauté de son destin – c’est vrai que c’était un comble pour quelqu’un comme elle de se retrouver liée à Hǔ. Elle aurait pu tomber sur tellement mieux. Le chinois soupira, sortant de son abri de fortune, toujours complètement sur ses gardes. « C’est pas à moi qu’il faut poser toutes ces questions. Et t’as pas voulu de moi ? C’est très bien parce que j’ai pas voulu de toi non plus. REGARDE COMME ON VA BIEN S’ENTENDRE. Sérieux. »

Cela l’énervait, de se retrouver face à pareille créature. Mais il devait garder son calme, inspirer, expirer, et recommencer. Il savait que ça risquait d’arriver un jour, mais jamais, jamais n’avait-il imaginé que cela puisse se passer dans de pareilles conditions. Il aurait même pu en profiter pour balancer à la flic « Tu vois, c’est à cause de ce genre de situation, qu’on aime pas trop ça les étoiles ! » mais il se retiendrait, il ne voulait pas risquer d’éterniser la conversation avec elle.

Il voulait partir, le plus vite possible. Alors il avança de quelques pas, retourna en arrière et tourna sur lui-même. C’est vrai, il était un peu perdu. Juste un peu. Il reporta alors son attention sur la seule âme qui vive présente proche de lui, tentant de rester de plus civilisé possible. « C’est par où le centre ville ? » La tension était palpable dans sa voix, mais il faisait des efforts, au moins pour se sortir de là avec un minimum d’embrouille.

Oh non. Non seulement il avait hérité d’une étoile, mais d’une étoile enquiquinante en plus. Ce n’était définitivement pas. Sa. Journée. Il lui avait juste demandé par quel côté se trouvait le centre-ville et ce qu’elle lui répondait là, était tout SAUF les indications pour se rendre au centre-ville. Il eût envie de la secouer en lui disant « SI ! SI TU PEUX M’IGNORER ! » mais une fois de plus, il se retint. Il se mordait la lèvre, pensant que ça l’aiderait à rester serein.

Elle s’était ensuite tournée vers lui, et là, il s’attendait au pire. Elle avait ce genre de regard qui ne le mettait pas du tout en confiance pour la suite des événements. A chaque seconde supplémentaire qui passait, il regrettait un peu plus ce moment d’abrutisme où il avait décidé de mettre les pieds dehors aujourd’hui. S’il était resté chez lui, de un il aurait presque fini sa série, de deux, il ne serait pas là à devoir faire face à… ça.

Ce qu’elle disait lui donnait doucement envie de rire. Elle pensait vraiment qu’il avait besoin de sa « protection » ? Parce que c’est de ça qu’elle parlait n’est-ce pas, lorsqu’elle parlait de son « devoir » ? Mais c’est bon, il est rôdé Hǔ, il a pas besoin de quelqu’un pour l’aider à survivre. Sans compter qu’elle voulait qu’il lui file son adresse. Elle se rendait compte de ce qu’elle disait ou… ? C’était à se demander.  

Et blablabla, et blablabla. A l’entendre, il avait l’impression qu’elle comptait ne pas le lâcher d’une semelle tant qu’elle n’avait pas trouvé quoi faire de lui. Cette idée ne lui plaisait pas, au tigrou, et il n’allait probablement pas se laisser faire comme ça. Il l’observa commencer à s’éloigner, sans bouger. Nerveusement, il envoya ses cheveux en arrière d’un coup de main, essayant toujours de rester le plus calme possible. Et là elle s’arrêta. Il en profita donc.

« Que je te donne mon adresse pour que tu m’aides à retrouver mon chemin ? Tu te prends pour quoi ? UN PXTAIN DE GPS ? A quel moment t’as cru que j’allais filer mon adresse au premier flic qui me la demande, ça me blesse presque de voir à quel point tu penses que je suis idiot. »

Il marqua une courte pause, inspirant profondément. Rester calme on a dit.

« Et non. NON. Je ne compte pas rester avec toi. Pourquoi je ferais ça ? On va continuer, chacun de notre côté, bien tranquilles. Je continue à faire mes trucs, toi tu fais tes trucs. On se revoit plus, tout le monde est content. En plus… »

Il croise les bras, un sourire étirant ses lèvres pour la première fois depuis cette rencontre fortuite. Un sourire carnassier, qui dépeignant sans peine le mal dans l’être de Hǔ.

« Tu ne voudrais pas que l’on pense que tu es en réalité une agent infiltrée ? Tu comprends, dans cette ville, il y a des yeux et des oreilles partout, et si malheureusement quelqu’un nous voyait ensemble… Shhh, ça pourrait porter un sale coup à ta carrière. Et voyons, je ne voudrais surtout pas que ma petite étoile aie des problèmes à cause de moi, je ne suis pas si méchant. Alors, on fait comme ça hein ? Toi, moi, chacun de notre côté. Et c’est tout. Allez. »

Cette fois ci, il avait l’air particulièrement calme et posé. Il était dans son élément, et était persuadé (ou du moins espérait grandement) que ça allait suffire à calmer les ardeurs de la flic. Sans attendre de réponse, il tourna les talons, commençant à s’éloigner dans l’autre direction. De toute façon, toutes les rues mènent à Rome, se disait-il.

Combien de temps est-ce que ça allait encore durer ? Il lui avait gentiment proposé de continuer chacun de leur côté, en faisant semblant que rien de tout ça n’était arrivé, mais non. Elle n’était pas d’accord. Elle avait quoi dans le crâne ? N’importe qui d’autre aurait probablement accepté sans rechigner. Et elle, elle était prête à risquer sa carrière à cause de quelqu’un comme lui. Et en plus, c’était lui sa carrière, techniquement.

Et s’il l’assommait ? S’il prenait sa petite tête et lui faisait rencontrer le mur ? Est-ce que ça arrangerait ses problèmes ? Ah c’est sûr, inconsciente elle aurait moins la capacité de le faire chxer comme elle le faisait actuellement – quoique, parce qu’elle avait l'air vachement tenace. Mais si elle en crevait ? S’il cognait un peu trop fort, parce qu’on se le dise, mesurer sa force n’a jamais été le point fort de Hǔ. Si elle mourrait, il mourrait. Et ça, c’est pas très bon pour la santé.

Il l’écouta parler, parce qu’il n’avait pas d’autre choix aussi. Elle répétait plus ou moins la même chose, changeant vaguement l’ordre de ses phrases, mais la même idée revenait ; elle n’allait pas le lâcher. Un soupir lui échappa, de toute façon autant la laisser le ramener vers le centre-ville, puisque seul il risquait de mettre un certain à s’y retrouver… surtout s’il fonçait droit dans une impasse.

Il allait donc devoir se résigner à la suivre. Pas longtemps. Au moins jusqu’au moment où il pourrait se repérer seul. Même s’il la sentait venir, elle allait continuer à le bassiner avec des « c’est mon devoir, tu ne dois pas me quitter ! » et autres trucs du genre. La suivant, pas de trop près d’ailleurs, il laissa quelques instant passer avant de prendre la parole.

« Si tu veux vraiment te rendre utile, va voir tes copains et, j’sais pas moi, donne leurs des fausses pistes, dis leur que je suis mort ou quoi. Parce que c’est vraiment pas en me collant au cxl que tu vas me rendre la vie plus facile. Même si c’est pas forcément ton but, je le conçois. »

Il leva les yeux vers un coin de rue. Ah tiens, le panneau accroché au mur, il le connaissait. Le tigre était bien moins perdu que ce qu’il le pensait. A partir de là, il saurait se débrouiller seul, mais, le problème, c’était elle. Il ne pouvait vraiment pas la laisser le suivre jusqu’à chez lui, imaginez un peu l’ampleur qu’une telle erreur pouvait prendre. Cela pouvait mettre tout le groupe en danger, et il refusait de prendre pareil risque. Il s’arrêta.

« C’est bon, je sais où je suis. Je peux pas vraiment aller en plein centre ville tu vois, donc je vais aller prendre un taxi là-bas. » Il indiqua une zone géographique assez floue d’un coup de menton. « Je ne peux vraiment pas te laisser aller jusqu’à chez moi. Aller, je te laisse mon numéro de téléphone si tu veux, comme ça tu m’appelles et on s’arrange un truc, hein ? Allez, faisons ça. »

Il lui tendit la main, attendant qu’elle lui file son téléphone pour qu’il puisse marquer son numéro dedans, et s’en débarrasser une bonne fois pour toute. De toute façon, même s’il ne lui donnait pas un faux numéro, les appels c’était simple à esquiver, et il trouvait de toute façon que sa proposition était tout à fait juste pour l’un comme pour l’un autre.