Maybe i'll die [pv Satoshi

Peut-être qu'il allait mourir. Une pensée morbide qui était présente dans son esprit depuis un long moment. Elle est apparue lorsqu'il a commencé à perdre pied, à ne plus comprendre, à ne plus voir, à ne plus sentir la douleur tant elle était insoutenable. Avait-il finit par aller trop loin ? Ceux qui s'acharnaient sur lui semblaient le penser. Le noiraud lui, souriait. Non, il n'était pas encore allé trop loin.

Parce qu'il était vivant. Effondré sur le trottoir, il était face contre terre, sa joue droite délicatement posée contre le sol glacé. Des flocons. Quelle heure était-il ? Le jeune garçon n'en savait strictement rien et il n'y avait personne dans les environs pour le lui dire. Ryūku soupira doucement, ouvrant ses prunelles noirâtres, attendant sans bouger que sa vision se stabilise. Son corps semblait avoir disparu, aucune douleur ne lui arrachait de grimace. C'était en réalité que la douleur était omniprésente, un seul mouvement le briserait en deux. Pourtant, l'adolescent savait qu'il ne pouvait pas rester couché là, il devait au moins s'asseoir ou se coucher sur le banc sous l'abri de bus. Rassemblant des forces inexistantes, Ryūku rampa en grognant de douleur, tendant un bras pour agripper le banc, se hissant avec difficulté, dents serrées.

Tout en lenteur. Le voilà enfin à l'abri des flocons de neige. Le noiraud s'assoit, enfoncé dans le banc, les bras appuyés sur le dossier, tête basse et yeux clos. Ses côtes se soulèvent doucement, dans un rythme incroyablement lent. Sa lèvre inférieure était explosée, son arcade saignait, sa joue gauche était gonflée, ses vêtements imbibés de sang et déchirés par endroit, son poignet droit lui faisait un mal de chien. Il avait bien dégusté ce coup-ci, sa jambe gauche le lui rappelait par pic de douleur. Pas de bruit. Personne. Seul les flocons, le silence et les quelques gouttes de sang tâchant le sol. Un bus arriva soudainement, ouvrant ses portes, crachant trois êtres qui semblaient aucunement ne faire attention au gamin effondré là. Certainement un SDF défoncé. Et puis, ils avaient bien autre chose à faire.

Ryūku ne se plaignait pas. Il attendait. Il se remettrait de ses blessures dans la nuit et rentrerait discrètement. Du moins, il l'espérait. Jamais il n'avait compter sur quelconque aide, cela ne débuterait pas maintenant.

Tu jetas un dernier coup d’œil a ton emploi du temps du jour. Un horaire avait été entouré en rouge : 15h45. Tu n’avais pas oser demander pourquoi cet horaire était si important pour ton patron mais tu en avait facilement déduis qu’aucun retard ne serait accepté aussi tu saisis ton portable et après avoir réfléchit a trois tournures de phrases différentes tu appelas ton chauffeur. Lorsque celui-ci t’annonça plutôt anxieux qu’un empêchement de dernière minute l’empêchait de venir tu répondit sur un ton qui trahissait ta panique que tu allais faire sans, en espérant que ses problèmes ce résolvent vite. C’était, bien sur, de bon cœur que tu lui avais laissé sa journée mais maintenant tu te retrouvais sans réelle solution pour te déplacer sur ton lieu de travail. Il y avait évidemment toujours un remplaçant mais tu ne te sentais décidément pas de déranger une seconde personne dans sa petite journée. Tu sentis bientôt les larmes te montées aux yeux, comme d’habitude lorsque tu étais dépassé pas une situation imprévue.

Pourtant, il était hors de question de t’apitoyer sur ton sort. C’est donc saisi d’une énergie nouvelle que tu demandas a Google le chemin le plus rapide pour te rendre sur place puis te mis en route vers la station de métro la plus proche. Tu était habillé d’un joli schéma de couleurs bleu pastel et avait même enfiler ta cape favorite dans un vain espoir de pouvoir te raccroché a quelque chose si tu était saisi d’anxiété soudaine, ce qui arrivait malheureusement trop souvent.

Il était presque 15h lorsque tu ressortis du métro. Des flocons de neiges ce mirent a tomber, annonçant que l’hiver étaient encore bien loin d’être fini. Fermant les poings dans tes gants, tu ne supportais vraiment pas le froid mais, il n’y avait pas grand-chose a y faire a part espérer que le printemps arrive plus vite. La prochaine étape était maintenant de prendre le bus jusqu'à l’avant dernier arrêt avant le terminus, cette étape prendrait environ 40 minutes, si tout ce passait bien tu arriverais pile à l’heure.

Seulement voilà, c’était la première fois que tu empruntais cette ligne et ce qui devait arriver arriva, tu descendis au mauvais arrêt. Rien de très grave, seulement deux arrêts trop tôt mais cela suffit a bouleverser tout tes plans. Non seulement tu ne savais pas où tu étais mais en plus attendre un second bus risquait de prendre beaucoup trop de temps sachant qu’en bordure de ville les bus ne passent qu’une fois toute les heures. Tu claqua la langue, puis te fis violence pour rester le plus calme possible. Si tu prévenait le patron que tu allait être en retard de « quelques » minutes tout devrait bien ce passer. Continuant donc a pied tu vis rapidement le second arrêt de bus ce dessiner au bord de la route. Peut-être que finalement tu y arriverais a temps ?

C’est ce que tu venait de te dire lorsque ton regard tomba sur un spectacle qui te fit manquer un battement de cœur. Un garçon était là, a moitié étendu sur le banc, tu pensas d’abord qu’il était mort mais le nuage de vapeur qui s’échappait de sa bouche à chaque expiration t’indiqua l’inverse. Tu ne cacha pas ta surprise et lâcha un « Oh ! » signe que tu étais rassuré mais également paniqué a l’idée qu’il te claque dans les doigts. Il fallait, de toute évidence, venir en aide a ce garçon qui te semblait être a peine plus jeune que toi. Ta respiration ce faisait haletante, un peu prit de cours par la situation, tu t’accroupis néanmoins prêt de lui et demanda tant bien que mal ;

«  Est-ce que je peut vous aidez ? …V…vous avez froid ? »

Tu agitais tes mains ne sachant trop que faire puis, dans un élan de lucidité, empoigna ton portable et composa le numéro des secours. Ta voix étant loin d’être fluide on te demanda de répéter plusieurs fois l’issue du problème, la personne a l’autre bout du fil tenta de te rassuré en t’expliquant calmement que les secours arriveraient d’ici peu. Tu raccrochas. Pas vraiment calmé par la situation, surtout quand tu savais que les secours pouvaient facilement mettre du temps à venir si l’on estimait que ta demande n’était pas de premier ordre. Enfin, dans l’immédiat la question n’étais pas de savoir combien de temps ils mettraient mais bien comment tu allait te débrouiller en attendant.

« L…les secours ne d-devraient pas t-t-tardés. »

Enfin, j'espère.

 

Dans le flou, il ne comprenait pas vraiment ce qu'il se déroulait là. Il y avait une forme rosée qui s'agitait trop à son goût. Le jeune adolescent tenta un geste lorsque l'être vivant appela les secours, parlant trop vite, devant s'y reprendre. L'autre parlait de nouveau, inquiet. Pourtant, ce n'était une forme de soulagement qui naissait en Ryūku. C'était une colère sourde qui montait, doucement, lui offrant soudainement une possibilité de bouger en dépit de la douleur. Alors, la noiraud se pencha légèrement vers l'avant, les doigts de sa main droite empoignèrent le col de l'être salvateur qui ne faisait qu'une bonne action. Ce qui n'était pas au goût du jeune garçon aux prunelles noirâtres. Ces dernières s'ouvrirent, dévisageant le visage fin, les cheveux longs et roses. Nullement perturbé par le fait de savoir si l'être présent là était de sexe masculin ou féminin, Ryūku resserra son emprise et fronça ses sourcils, avançant son visage vers celui de l'inconnu, le faciès brûlant de colère. La douleur ? Il l'ignora.

« J't'ai pas d'mandé d'appeler les secours, j'ai pas besoin de ton aide. Dégage t'occuper de tes affaires, laisse les gens crever en paix. »

Il y avait différentes raisons pour lesquelles le jeune noiraud ne désirait jamais aller se faire soigner à l'hôpital. Son père qui s'occuperait clairement de lui rouvrir ses plaies en hurlant et en frappant, le fait qu'Amnesia serait peut-être au courant, l'argent. De toute manière, il n'aimait pas ces endroits qui lui donnait la nausée. Le jeune garçon soupira doucement, grognant à cause de la douleur, relâchant sans douceur le col du celui qui tentait simplement d'aider. C'était tout à fait compréhensible. Pourtant, Ryūku n'avait pas l'habitude de cela. L'aide. Alors le fait qu'un être ne s'occupe de de ses oignons comme le jeune garçon avait l'habitude de voir, cela le décontenançait. Et comme à chaque fois qu'il était dépassé, il réagissait sur la défensive, il était violent. Violent envers cette étrange personne à crinière rosâtre. Le plus jeune reprit doucement une mine moins frustrée, la lueur précédemment allumée dans son regard s'éteignit, le feu dans son cœur était stoppé. Léthargie. De nouveau.

Il s'enfonça au fond du banc et observa ce qui semblait finalement être un jeune homme.

« Appelle les secours. Dit qu'il n'y a rien, j'veux pas aller à l'hôpital. J'pas besoin, je vais parfaitement bien. », siffla Ryūku.

Ce-dernier posa alors une main sur le dossier du banc et tenta de se relever complètement pour prouver ses paroles. Mais ses jambes décidèrent du contraire, il chancela, conserva un équilibre fragile grâce à sa main toujours contre le dossier du banc. Seulement, il opta pour se rasseoir en grognant à cause de cette fichue douleur qui hantait et hanterait son corps. Corps qui avait déjà trop supportée, trop souffert et qui ce soir décidait de ne plus réagir. Du repos, c'était tout ce qu'il demandait à ce sale gamin à crinière noire qui ne cessait de bondir et de se battre, ignorant ce corps qui subissait tout pour lui.

Un problème ne venait jamais seul. C’était bien courant. Pourtant tu avais oser espérer que tout ce règlerait facilement, c’était comme ça que ça ce faisait en général. Enfin, en théorie. Car, sans même avoir eu le temps de te remettre de ton coup de fil, tu te retrouvais maintenant à faire –littéralement- face au pauvre blessé que tu ne souhaitais qu’aider. Visiblement loin d’être satisfait de ton initiative il te le fit comprendre plutôt sèchement et te prit par le col pour te le dire les yeux dans les yeux. Te laissant là, trop choqué pour dire quoi que ce soit ou même verser une seule larme. Tu clignas des yeux, reflétant ton incompréhension du moment puis ton cerveau ce remit en marche juste a temps pour encaisser la seconde salve de paroles. Cette fois-ci tu eu un mouvement de recul. Appeler le secours une SECONDE fois ? La première t’avais déjà vidé de toute ton énergie mais alors une seconde et pour revenir sur ta parole qui plus est ? Tu secouas la tête, terrifié à l’idée même de devoir faire une chose pareille. Il en était hors de question. Tu n’allais pas le laisser là agonisant tranquillement et même s’il ce plaignait, tu ne bougerais pas. Non mais.

« Allo ? »

Elles sont bien belles tes paroles mais quand on est incapable d’accorder ses actions avec ses envies, on évite de se rassuré tout seul comme tu le fais a chaque fois.

Alors tu étais là, accroché à ton téléphone, ravalant tes sanglots à chaque seconde de l’appel, expliquant le plus calmement du monde que c’était une fausse alerte. Prenant en même temps les remontrances de la secrétaire qui était bien loin de connaître la vraie histoire, elle te demanda néanmoins a plusieurs reprises si tu allait bien. Tu raccrochas après avoir promis de ne plus appeler sans raisons. Les joues rougies par l’embarras et la frustration, une larme traça rapidement sa route sur ta joue droite suivie par une seconde puis, finalement, ce fut un flot complet qui t’obscurcit la vue. Encore une fois. Silencieusement, tu vins rapporter ton visage entre tes mains, tentant pitoyablement de te cacher, honteux. Mais cacher quoi, au juste ? A ce moment là, il n’y avait plus que toi, te rendant coupable de tous les maux du monde. Ta faute ? Avoir voulu aider un inconnu dans la rue. Ta punition serait d’être condamné au châtiment de honte publique.

Tu restas ainsi quelques minutes, pris au piège dans tes propres pensées. C’est après t’être fait violence que tu repris finalement le contrôle de toi-même, une bonne fois pour toute, espérons le. Lentement, tu t’inclinas, étant déjà accroupis sur le sol tu pu présenter tes plus plates excuses. Tu le fis d’une voix étonnement fluide qui contrastait avec ton corps qui tremblait encore après avoir pleurer aussi fort quelques secondes auparavant.

« Je m’excuse pour avoir causer autant de soucis alors que ça ne me regardait pas, vraiment et de tout mon cœur, j’en suis désolé. »

Tu te relevas, te frotta les mains puis repris.

« Cependant. »

Une pause. Qu’allais tu dire ? Pourquoi avoir repris la parole alors que tu avais déjà présenté tes excuses ? Tu secouas la tête, faisant passer une de tes mèches roses devant tes yeux. Quitte à commencer quelque chose, autant le finir. De toute façon, tu étais bien en retard maintenant alors, ça n’avait plus d’importance.

« Je pense que cela serait une mauvaise idée de te laisser seul par ce froid, aussi j’ai décidé de rester ici jusqu'à ce que tu sois au moins capable de marcher. »

Tu tentas d’appuyer tes propos en croisant les bras, te donnant un air faussement autoritaire. Retirant même ton vouvoiement a profit du tutoiement, on aurait presque pu croire en la naissance de Satoshi 2.0 si ton esprit ne répétai pas « MAIS QU’EST-CE QUE TU FAIS. » en boucle depuis 10 minutes.