яεvεηgε • ft. Fenrir Abe [ Terminé ]

L’obscurité surplombe à présent la ville, les lampadaires projetant leur lumière âcre sur les pavés humides. Il venait juste de fermer son cabinet - une journée pauvre en clients hélas mais tout aussi satisfaisante que les autres, revoir les personnes qu’il avait l’habitude de voir pour assimiler leurs capacités à s’adapter et aux réactions face aux mots était toujours aussi jouissif à observer.

Sa silhouette obsidienne déambule calmement dans les rues - préférant profiter du calme pour le chemin du retour de la manière la plus humaine possible. Ses pensées étaient focalisées sur son humain depuis la découverte de ce dernier. Il avait hâte de ce moment, où il rencontrait l’âme à laquelle il serait lié jusqu’à ce que la mort les sépare, dramatique lien, dramatique destinée. Jusqu’à présent, il n’avait pas vraiment eu besoin de le protéger - hélas ? -, à croire que l’entraînement qu’il a effectué depuis sont enfance n’était qu’un effort vain et que la vie est bien plus calme qu’elle n’est censé l’être. Il voit déjà cette routine lambinante s’installer dans sa vie - ce Keita semblait tellement… ordinaire ? Lui qui avait l’habitude de voir des âmes tourmentées, dédaigneuses, ou qui avait au moins le moindre élément qui aurait pu susciter l’intérêt et la curiosité de l’étoile, il était étrangement déçu mais ne perdait pas espoir. Il y a toujours un potentiel à exploiter.

Comme chaque jour, il préfère prendre des nouvelles de sa tête rousse. Il compose son numéro depuis son portable et l’appelle - pas de réponse. Il réitère une seconde fois son geste, agacé. Puis, les répondeurs s’enchaînent sans aucune réponse. Il ne lui fallut que quelques seconde pour rejoindre l’horlogerie de l’homme, vraisemblablement fermée ainsi qu’une poignée supplémentaire pour aller voir s’il était à son domicile. Recherches infructueuses, ses dents grincent sous l’énervement et l’inquiétude - un sentiment tellement détesté du brun, cette sensation d’être impuissant au temps et à la fatalité, peu importe les moyens employés pour venir à bout de ce sentiment répulsif.

Il trace le chemin de son travail jusqu’à chez lui, et il ne lui fallut que peu de temps pour entendre des voix transcendant le silence nocturne en provenance du parc. Le souffle légèrement court, ses pas s'enchaînent sur le sol. Silencieux, il observe, préférant ne pas arriver en trombe pour ne pas affoler d’éventuels passants. Et c’est au loin qu’il la voit, son pauvre humain en perdition, étalé au sol, surplombé par un pauvre groupuscule d’hommes qui s’amusaient à lui faire mordre la poussière. Une grimace déforme son visage - mélange entre dégoût et satisfaction, quelle race étrange, faire subir une telle humiliation à un semblable qui n’a à première vue rien de différent - acte impardonnable peu importe la raison.

Il prend appui pour s’élancer, l’emprunte de son pied fissurant le pavé sous l’impulsion de son geste, il ne lui fallu qu’une seule seconde pour se glisser dans le dos de celui qui se chargeait de faire souffrir le pauvre humain, sa jambe balaya les siennes à une vitesse fulgurante pour le faire s’écrouler au sol, alors que son talon se chargea d’écraser sa face à grands coups. Peut-être le nez, la mâchoire pétée ou quelques dents en moins, cela n’était rien comparé à ce qu’il avait fait subir à l’horloger. Le temps sembla reprendre son cours - les racailles ne s’étaient rendu compte de l’état de leur chef qu’au moment ou son crâne heurta le sol.

Un regard noir, il ne chercha pas à faire un carnage - il ne possède pas ce vice, ce sadisme ou ce plaisir que certaines personnes auraient pu avoir en voyant des visages horrifiés. Ils s’en allèrent, laissant littéralement leur supérieur ici bas, pathétiques créatures hypocrites. Le pied de Fenrir quitta le visage de l’homme suite à plusieurs supplications, mais il n’en eu pas finit.

Il s’écarta pour mieux le choper, agrippant ses cheveux, s’accroupissant face à sa carcasse.

Je ne suis pas aussi stupide et cruel que toi et tes petits copains, mais je te jure que si tu oses t’approcher encore une fois de lui, je te promet, vraiment que tu vas passer un sale quart d’heure. Dégage.

Il le lâcha, époussetant ses vêtements en l’observant fuir à grandes enjambées, avant de s’approcher de son humain pour l’aider un peu à se redresser et observer plus clairement son visage, essuyant salive, sang et larmes qui avaient tâché son épiderme depuis bien longtemps. Il soupire en observant l’état de son visage et s’assied par terre pour mieux l’agripper.

Ca va ? C’était qui ces gars, tu les connais ? Il plisse les yeux. ...Regarde l’heure, tu as quitté si tard le travail aussi...

Des représailles, qui plus est effectuées plusieurs années après, ces gens étaient vraiment stupides. Fenrir ne commente pas, acquiesçant d’un rapide hochement de tête suite à ses dernières paroles. Tu devrais apprendre à te défendre, ou à courir plus vite.

Il se lève au moment où le roux en fait de même, gardant une main autour de lui au cas où ses jambes venaient à flancher, il lui prend un bras pour l’enrouler autour de son cou, tendis que sa main à lui se glissa contre sa taille pour le maintenir debout. Il attrape son sac d’une main libre et la pose sur son épaule. Il léger regard derrière son épaule.

Je t’accompagne chez toi.

Des mots soufflés avec une pointe d’ennui - peut-être était-il destiné à jouer la mère et à éloigner les potentiels menaces de son fils, en attendant, il espérait avoir affaire à quelque chose d’un peu plus intéressant par la suite. Il jette quelques regards à l’homme aux cheveux de feu durant la route, s’autorisant à briser le silence quelques fois. On est bientôt arrivés, fais pas ton fragile et ne t’appuie pas trop sur moi, t’es lourd. Oh le diplomate et affectueux Fenrir était niché dans un monde bien trop onirique à l’heure actuelle, alors que son corps commençait à devenir à son tour endolori par l’effort et surtout la journée.

Une fois devant la porte du domicile, il fait glisser le sac le long de son bras, s’y penchant pour inviter sa main à l’intérieur et fouiller les clés de Keita, les extirpant de leur antre obscure pour finir par déverouiller la porte après plusieurs tentatives. Il pousse la porte d’un coup de pied, choppant le sac au vol avant de s’immiscer dans sa demeure en compagnie du propriétaire. Les lumières s’allument, il dépose le sac à l’entrée, la refermant derrière lui, avant de laisser tomber le cadavre du pauvre humain contre le canapé en position assise après lui avoir retiré son manteau au préalable.

Tiens, voilà, ne bouge pas.

Ses yeux détaillent légèrement son domicile au fur et à mesure qu’il le parcourait, arrêtant cependant son excursion à la salle de bain pour aller mouiller un gant avec de l’eau fraîche. Il se serre de son index pour retirer son écharpe violacée et l’abandonner sur le canapé alors qu’il s’accroupit pour arriver plus ou moins à la hauteur du visage du roux. Il commence par lentement frictionner son visage meurtri en prenant soin à ne pas trop insister sur les endroits où l’hémoglobine avait coulé.

Tu sais, à l’avenir, si tu es réticent à l’idée de rentrer seul, je peux toujours te raccompagner chez toi. Ca me gêne pas, fin je suppose. Disons que je préfère te savoir en sécurité à défaut de devoir te supporter plutôt que de risquer une nouvelle fois que « ça » arrive.