We're going for a ride || PV. Elena

Il avait plu, ses vêtements étaient trempés, mais il s'en moquait complètement. Il n'avait pas beaucoup dormi, et c'était le seul endroit où il pouvait s'allonger... donc ouais, il ne risquait pas de bouger. Sa tête lui faisait mal, mais pour une fois, il allait plutôt bien. Simple migraine ; il devait avoir la crève, sa gorge le faisait souffrir aussi... raison pour laquelle il se roulait dans l'eau, oui. Hannes n'était pas logique. Mais aussi, il avait oublié les clés à l'intérieur et son coloc était pas là, évidemment qu'il était obligé de rester dehors. Et l'endroit qu'il fréquenterait était tout choisi.

Si il y avait bien un lieu que Hannes avait continué de fréquenter à Hoshikami après avoir fui Mikhail, c'était bien le parc. Un endroit paisible, habituellement vide de monde en cette saison, où personne ne risquait de le déranger... si ce n'est ces affreux oiseaux qui voletaient de temps en temps près de lui. Son fidèle exemplaire de Abyss of the Human Mind plaqué sur le torse, l'Etoile somnolait, allongée sur un banc humide, contemplant le ciel nuageux de son unique oeil valide. Ses mèches presque blanches étaient balayées par les vents, mais cela ne semblait pas le perturber. Le jeune homme était toujours aussi neutre en apparence, après tout. Qui se serait douté qu'une guerre se déroulait dans le coeur de ce doux rêveur qui contemplait le ciel, cherchant des vers douteux susceptibles d'accompagner ce mélancolique paysage ?

Certainement pas cette exhibitionniste passant par là. Entendant le bruit de ses pas, Hannes se tourna vers elle, écarquillant son oeil unique lorsqu'il l'aperçut. La demoiselle était en tenue légère – beaucoup trop légère pour ce temps de chien et pour les conventions sociales, en fait – et ça... comment dire... perturbait beaucoup Johannes. Instinctivement, par pudeur, il plaça ses bras autour de son propre torse, ce jour-ci recouvert d'un épais chandail noir et blanc. Autant dire que ça n'eut pas vraiment d'effet ; la demoiselle était toujours aussi indécente. Mais c'est alors qu'il se sentait prêt, au mieux, à retourner se coucher, au pire, à lui gueuler dessus dans un accès de colère en lui disant que c'était n'importe quoi et qu'elle allait crever d'une pneumonie dans les mois qui suivaient, qu'il se rappela de quelque chose. Justement, elle allait mourir de froid. Alors peut-être qu'elle était juste pauvre et qu'elle n'avait pas les moyens de se payer quoi que ce soit... Et il n'avait pas de raison de faire preuve d'une quelconque animosité à son égard. Prenant son livre entre ses dents, tout comme il mordait les canapés à une lointaine époque, Hannes se leva, s'approcha de la demoiselle et, rapidement, la prit dans ses bras... ou plutôt, sur son épaule, comme un sac à patates.

"Vous allez geler si vous restez ici. Donc je vous porte jusqu'à un endroit chaud pour que vous surviviez."

Il avait expliqué cela d'un ton extrêmement sérieux, tout en avançant, la demoiselle toujours sur son dos. Il fallait bien lui expliquer pourquoi il faisait ça ; généralement, les gens ne voulaient pas comprendre ses actions et lui criaient dessus sans raison logique. D'une voix rauque, sans cesser de mâchouiller son bouquin, il ajouta, toujours aussi stoïque :

"Le contact physique est un signe de compassion et d'affection. Euh... du moins c'est ce qu'on m'a dit. Ca me gène mais il parait que c'est bien, donc voilà, je vous porte !"