Bière saucisson, que demande le peuple? [Gaby]

[Désolée pour mon temps de réponse =s ]

Gabriel fait une petite remarque sur mon boulot. Un de plus. J’ai presque toujours le droit à la même remarque. Comme à chaque fois, je souris, hochant la tête. Bon allez, vu que j’aime bien sa tête, je vais même lui répondre à ce sujet.

– Si tu bois trop je te mettrais en PLS, t’inquiètes.

Mon sourire s’agrandit. Je sais pas, il me fait rire le bonhomme. Il enchaine direct sur mes petits bobos. Ah, s’il m’avait vu après des défaites, là c’est des petites blessures de victoires de rien du tout. Je pouffe à mon tour, levant les yeux au ciel.

– Un type vachement vénère ? Ahah, je suis peut-être amoché mais t’as pas vu sa tête, je m’en sors super bien !

Ouais, je me la pette un peu, chose courante quand je suis face à une nana, mais étonnante quand je suis avec un mec.
Je vais pas me demander pendant trois plombes pourquoi il semble que j’ai envie de l’impressionner, de toute façon il détourne déjà son attention sur l’ordinateur pour remplacer la médiocre DJ. Pink Floyd, une valeur sûre. Bien joué mec, ça ça devrait plaire à la grande majorité des convives.

Allez, il repart sur ses histoires d’étoiles. Putain ça me gave ça. Comment les gens peuvent encore y croire ?

– Des conseils d’étoile ? Non mais sérieusement, il y a un moment où il faut arrêter l’alcool, ça te fait dire n’importe quoi.

Je porte ma bière à mes lèvres, vidant la bouteille d’une traite. Il me faut bien ça s’il me lance sur le sujet houleux des étoiles. Ca me sidère, de plus en plus.

– Comment on peut croire à quelque chose d’aussi stupide ? Concrètement, comment est-ce que des êtres humanoïdes pourraient tomber du ciel, se ramener la bouche en cœur avec des super pouvoir, et se dire lié à un humain lambda choisi au pif ? Ca n’a aucun putain de sens.

Je secoue la tête, levant les yeux au ciel. Posant ma bière sur la table basse, je passe une main dans mes cheveux, les repoussant de mon visage. J’ai chaud. Ces conneries de discours sur les étoiles me donnent chaud.
Du coin de l’œil je vois l’hôte de la soirée passer avec des bières, derrière le canapé. Je lui fais un signe, sourit, tend le bras pour prendre une bouteille qu’il me tend. Un geste tout ce qu’il y a de plus bidon. Mais quand je tends le bras au dessus des épaules de Gabriel, la peau de mon avant-bras touche celle de sa nuque. Ca n’a aucune espèce d’importance, mais je ne peux pas retenir un léger sursaut en sentant une petite décharge d’électricité statique.

Je grimace, reprends ma place initiale sur le canapé, et décapsule ma bière avec un briquet abandonné sur la table basse.

– Scuze, on a pris le jus…

[hrp : Libre à toi d’ellipser une partie du concours de shoot =) ]

Il se fout ouvertement de ma gueule. Remarque, ce ne serait pas le premier à se moquer de mon avis sur les étoiles. Mes potes savent que je pars au quart de tour quand on aborde le sujet, ils savent aussi quand arrêter les railleries. Etant donné que ce gamin ne fait pas parti des fameux potes, il ne sait pas à quel point la situation me fout en rogne.
Il en pleure de rire le fourbe. Je serre les dents, me disant que malgré tout ce qu’il pourrait bien me dire, mon avis sur la question n’est pas prêt de changer. Non mais sérieusement, qu’est-ce qu’il croit. Et puis à part une explication telle que « Ta gueule c’est magique », aucune ne tient la route. Vise la théorie fumeuse.

Je grommèle pendant qu’il se bidonne, et bois ma bière en silence. Il ne me fera pas changer d’avis… Buté comme je le suis, personne ici ne me fera changer d’avis. Excepté peut-être… La jolie brune de l’autre côté de la table basse. Je dois dire qu’elle a des… Arguments, bien plus convaincant que ceux de Gabriel. Je me radoucis en la regardant du coin de l’œil, ça me permet d’oublier le désagréable moment qui arrive à chaque soirée sans exception, que j’ai appelé « tiens si on parlait étoiles à Lucas pour le voir partir au quart de tour ». S’il n’y avait pas un telle concentration de jolies minettes dans le coin, je serais surement partit bouder à l’autre bout de la pièce, comme un sale gosse mal élevé.

Gabriel se calme et fini son verre d’une traite. Il m’a soulé, mais j’avoue qu’il a une belle décente, on ne peut pas lui enlever ça. Un type non loin de là, enfin je suppose puisqu’à portée de voix, propose des duels de shooters. Sérieux ? Ca fait quoi, une éternité que je n’ai pas entendu ce genre de trucs. Depuis mes années étudiantes en fait. C’est bon, je suis passé dans la catégorie « vieux cons » à présent.
Gabriel me défie. Il a compris comment je fonctionne visiblement. A un simple « tu joues avec moi » j’aurais sans doute répondu non, et serais finalement partit bouder ou draguer de la minette, mais à un « tu ne fais pas le poids face à moi », je ne peux que répondre par l’affirmative. Qu’est-ce qu’il croit ? Qu’avec sa carrure de chaton chantant dans un boys-band il va pouvoir tenir le coup face à moi ? Ok, mes années étudiantes sont loin derrière et je n’ai plus les épaules du pochtron que j’ai pu être en soirées infirmières, mais je suis un concurrent redoutable. Et puis, j’ai plus de masse à imbiber avant de finir torché.

– Ah ! Compte là-dessus et bois de l’eau fraîche.

Expression sortie tout droit du vieux grimoire de ma grand-mère. Qu’importe, le duel est lancé. La jolie brune de tout à l’heure est en train de couper du citron. Ah, teq paf certainement. Remarque, c’est moins dégueu que la vodka. Un mec ramène deux shooters sur la table basse, et pose la bouteille de tequila devant nous. Une salière dénichée je ne sais où plus tard, et nous voilà parés.

Je n’installe confortablement, assis en tailleur, devant la table basse, et sans quitter mon adversaire des yeux, lèche le dos de ma main pour y déposer du sel, dans le creux à la base de mon pouce. J’attrape mon verre et attends qu’il soit prêt.
C’est partit, je lèche je sel, vide mon verre que je repose bruyamment sur la table, et mord dans un quartier de citron préparé par la jolie minette. Le défis peut commencer.

[L'homme bourré... Mon pauvre Lucas]

Un verre de plus, allez, rien qu’un de plus… C’est ce que je me dis depuis près de 6 verres. J’essaie de me convaincre que le prochain sera le dernier, et puis c’est jamais le dernier. Putain c’est qu’il tient bien le petit gars… Je pensais pas qu’avec son gabarit de moucheron il tiendrait aussi bien l’alcool. Je regarde ce nouveau shooter devant moi, le citron, le sel, l’œil du tigre, et la foule qui m’encourage. Allez, je peux pas flancher maintenant…  

J’ai un sourire benêt aux lèvres depuis déjà bien trop longtemps, la moindre blague de merde me fait exploser de rire, et je ne tiens plus super droit sur ma chaise. J’essaie de trouver une explication au fait que ce minus pourrait bien me battre… J’ai bossé de nuit hier, là j’ai fait aprem-soirée, le manque de sommeil, la fatigue du boulot et les émotions lorsqu’il faut annoncer de mauvaises nouvelles aux proches… Tiens ils devraient faire comme moi les proches pour tenir le coup, un bon petit concours d’alcool, et ça repart ! Je pouffe à ma propre blague. Tiens, je dois avoir l’air malin à rire tout seul à des plaisanteries douteuses que je me fais dans ma tête.

Je posa ma main autour de mon verre et regarde autour de moi une nouvelle fois, comme si quelqu’un pouvait me sauver. Vise la loose si je n’arrive pas à le battre… Moi, je grand gaillard, plus vieux, plus de masse à imbiber, et je me laisserais battre par une crevette ? Allez faut pas déconner Lucas, on lève le coude, une dernière fois ! Une dernière fois ?
Je suis déjà une vieille loque, qu’est-ce que ça va donner avec une dose de plus ? Non mais sérieusement, l’infirmier qui se murge jusqu’à se rouler au sol, c’est l’hôpital qui se fout de la charité. Oh, l’hôpital ! Bon sang même sans le faire exprès je fais des p’tits jeux de mots. Je suis trop fort.

Je lèche le sel et porte le verre à mes lèvres. Allez, plus haut le coude. Vas-y Lucas ! Allez bonhomme, tu peux le faire !! Putain j’ai la gerbe ! Je repose mon verre à moitié plein sur la table. J’ai pas réussi à le finir. Oh non ! Je veux le reporter jusqu’à ma bouche, mais ma main se bloque à mi-chemin. Non, une gorgée de plus et je refais le parquet. Je le repose une fois de plus, l’assistance à l’air déçue.

– Il a des superpouvoirs d’étoile, je peux pas lutter contre ça… Wooh j’ai pas la voix très nette là. J’écarte les bras, impuissant. Hé, je ne suis qu’un homme, un homme génial, je vous l’accorde…

Je pouffe une fois de plus à ma propre blague, m’appuie sur le dossier de ma chaise pour le relever, et titubant, je contourne la table pour atteindre mon adversaire. Je passe mon bras, lourd le bras, autour de ses épaules.

– Hé béh, bien joué mec ! Je lui fais un bisou sur le front, pourquoi ? J’en sais rien, besoin d’affection ? Ou juste parce que je suis bourré peut-être… Allez, moi j’vais me rincer, c’était un beau duel !

Je lui donne une tape sur l’épaule et repars d’un pas se voulant assuré jusqu’à la salle de bain. J’enfonce à moitié la porte en appuyant sur la poignée, suis à deux doigts de m’écrouler sur le lavabo, mais reprends mon équilibre in extremis.
J’allume l’eau, comme je peux. Je vois carrément flou et j’ai des hauts le cœur, mais je suis joyeux comme tout. Penché sur le lavabo, je recueil de l’eau au creux de mes mains comme si j’avais trouvé le Saint Graal. Et je m’asperge le visage de Saint Graal, et j’en bois un peu pour faire passer le gout de la Sainte Tequila, et je recommence, et putain, j’ai envie de bouffer une banane avec un max de sucre ! Ouais, je vais faire ça, aller manger une banane… Bientôt. Mais avant, faut éteindre l’eau, se redresser, quitter la pièce et éteindre la lumière, retraverser le salon, et aller dans la cuisine… Oh putain c’est loin…

Je me sens comme dans un mauvais téléfilm du dimanche matin. Vais-je trouver la force de quitter la pièce pour me hasarder à trouver la cuisine. Enfin trouver… Je sais déjà où elle est, mais je dois avouer que je ne suis pas du tout sûr de réussir à y atterrir par mes propres moyens. Je pourrais tout aussi bien rester ici, faire une petite sieste, et me relever d’ici deux petites heures. Ce serait vraiment un bon programme si les chiottes n’étaient pas dans la salle de bain. Je vais surement me faire déloger avant la fin de ma sieste, et je ne tiens pas à être présent pendant que les invités font leurs petites affaires. Que faire… Le doute m’assaille, à moins que ce ne soit la gerbe. J’sais pas.

Une tape sur l’épaule, je me retourne pour tomber nez à nez avec ce petit étudiant en langue à la descente hallucinante. Qu’est-ce qu’il vient faire là ? Me rappeler ma défaite ? Que je viens de perdre toutes chances de chopper une des jolies demoiselles présentes à la soirée ? Ce n’est pas très gentil.

Putain qu’est-ce qu’il cause. Blabla Vodka… Blabla tomber par terre. Je me laisser glisser le long de la baignoire jusqu’à ce que mes fesses touchent lourdement le tapis de bain à côté de Gabriel.

– Si j’avais fini mon verre je serais moi aussi tombé par terre.

Je glousse moi aussi. Un joyeux concert de pouffements stupides. On est propres dis donc.
Mais qu’est-ce qu’il me raconte ? Il se sent bizarre ? Je lui montre du doigt les toilettes avant de laisser retomber mon bras le long de mon corps lorsqu’il m’explique que l’alcool n’y est pour rien. Je fronce un sourcil dubitatif, bah si c’est pas l’alcool, c’est quoi alors ? Une idée folle me traverse l’esprit, moment de panique.

– Tu vas pas me dire que t’es amoureux de moi hein ? C’est pas que j’t’aime pas, t’es sympa hein, mais t’es un mec… J’ai rien contre les gays, mais juste, moi j’préfère les filles, tu vois, avec des seins et des fesses et… ‘Fin…

Mon débit de parole est trop rapide pour la quantité d’alcool qui coule dans mes veines, je bafouille, m’embrouille, je ne suis même pas sûr que les mots sortent dans le bon sens. Et puis je le regarde. Non, c’est pas de ça qu’il voulait parler. Je me sens d’un coup très très con. Allez, on oublie cette dérive. C’est quoi ce truc bien trop cool qu’il veut me montrer ? J’arrive pas à deviner si c’est une blague ou non, s’il est sérieux ou non, si ça va vraiment être cool ou si c’est juste une connerie.

– Vas-y, épate-moi avec ton truc trop cool.

Je demande à voir. Parce que des trucs cool, j’en vois des tonnes tous les jours à l’hosto, au milieu des trucs moins cool… Ce que je dis n’a aucun sens. Putain je suis bourré comme un coin.