— bird ; oksana andreïev (100%)

couleur des yeux — bleus ; couleur des cheveux — blonds platine ; taille — 1m80 ; poids — 63kg ; tatouages ou piercings — aucun ; cicatrices — aucune ; style vestimentaire — Toute en élégance et en sobriété : tailleurs-pantalons sombres, grandes bottes de cuir, chemises blanches. Elle porte de grandes lunettes rondes. Elle est toujours impeccable : jamais une tache, jamais un fil qui dépasse, jamais de vêtements froissés.

Nom du pouvoir — Nuée d'oiseaux
Description du pouvoir — Oksana peut se changer en une petite dizaine d'oiseaux blancs. Minuscules, ils doivent toujours se déplacer en groupe. Discrets, ils peuvent s'avérer redoutables s'ils doivent attaquer une personne en le griffant ou en lui donnant des coups de bec. Leur petite taille leur permet une grande agilité. Si l'un d'eux se fait blesser, Oksana en subira les conséquences sur son corps humain. De même, si l'un d'eux est tué, elle sera gravement blessée et traumatisée. Toutefois, il faut tuer tous les oiseaux pour l'assassiner. Oksana n'utilise son pouvoir que rarement, pour observer. Elle n'a encore jamais attaqué qui que ce soit.

Oksana aime observer. Ici un flux de personnes harassées par un travail ennuyeux ; là de naïves étudiantes en marche vers une destinée toute tracée. Parfois il y a ces électrons libres à la marche hagarde croisant des voitures aux vitres fumées. Petite, elle s'est construite une réputation de fille bizarre. La fille qui ne parle pas. Qui se contente de scruter les autres jusqu'au bout, avec son petit air hautain. Depuis, Oksana parle - c'est son job après tout. Mais elle continue d'observer les autres. Vous clignez des yeux un peu trop souvent ? Vous vous grattez la tête à un endroit précis ? Vous prenez un drôle d'air à l'entente d'un mot ? Tôt ou tard, elle le remarquera. Maintes fois, sa perspicacité l'a aidée à comprendre la personne d'en face... Du moins, dans la mesure du possible. Elle sait qu'elle peut se tromper ; pourtant elle prend soin de ne jamais l'avouer. Afin d'entretenir le doute. Oksana ne s'ouvre pas : elle garde sa part de mystère, sa douceur passionnée, pour ceux et celles qui le méritent. Son affection est précieuse. Un joyau immaculé dont les privilégiés se comptent sur les doigts d'une main. L'être qu'elle protège n'y est sans doute pas.

Pourquoi ?  C'est avec une froideur pragmatique qu'elle vous répondra. Ce lien n'est que fardeau. Un vulgaire contrat sans aucun bénéficiaire. Une mission qu'on lui a donnée, sans même demander son avis. Pour les caprices d'une déité, sans contrepartie. Oksana refuse ce lien : un cadeau empoisonné, voué à bloquer ses propres ambitions. Elle refuse d'être traitée comme un vulgaire missionnaire. Elle vaut mieux que cela : on le lui a toujours dit et répété. Sa carrière fulgurante n'en est-elle pas la preuve ? Alors pourquoi s'encombrer d'un humain ? De quel droit peuvent-ils s'octroyer les pouvoirs des êtres stellaires ? Quand l'occasion leur sera donnée, à elles les étoiles, de tracer leur propre chemin ? Jamais. Sauf si quelqu'un s'en charge et ose monter au créneau. Ce sera elle. Par la force de ses convictions, et non à la façon de ces barbares de crépusculaires. Oksana réfute les accusations de copinage avec cette bande de voyous ignorants et racistes. Loyale à son parti, elle ménage les piques qu'elle pourrait leur glisser.  Ce qui, d'ailleurs, ne l'empêche pas de mentir ou d'occulter, parfois, quelques points de la vérité... L'honnêteté entière n'est plus accessible aux personnes de sa classe. Pas dans ce jeu-là.

Elle est ainsi, Oksana. Loyale. Incorruptible. Impitoyable. Son ambition l'a menée toujours plus loin, toujours plus haut ; presque au firmament. Sa loyauté demeure jusque dans ses rares relations proches. En amour, sa fidélité est sans failles : elle reste attachée au modèle traditionnel du couple sérieux de longue durée. Elle mesure son attachement à une personne à l'instinct. Son ou sa protégé(e) reste cependant une exception : certes, Oksana mènera à bien sa mission - puisqu'il en va de sa propre vie - mais l'être ne sera jamais rien d'autre qu'un boulet. Ce qu'elle ne manquera pas de rappeler, tant en privé que dans ses discours.

Oksana se souvient.

Oksana se souvient du moment où elle a ouvert les yeux, sous l’apparence d’une petite fille haute comme trois pommes. Elle se souvient de sa panique en se rendant compte qu’elle ne voit rien, ou plutôt qu’elle voit flou. En tâtonnant, elle croise le chemin de Vassili Andreïev, cadre chez Drake Industry. Il a vu la lumière bleutée descendre sans rudesse dans le jardin de sa villa. Vassili n’a pas d’enfant. Il ne veut pas s’encombrer d’une compagne, mais se voit perdu de tendresse pour la petite fille. Elle s’appellera Oksana, comme sa mère.

Oksana ne se souvient pas de ce qu’il s’est passé avant. Elle ignore tout de la vie dans le ciel. À quoi ressemble l’espace boudé par les humains ? Elle ne le sait pas, et même les plus belles images de la NASA lui semblent bien fades. Elle n’en a cure : si elle n’en garde aucune réminiscence, alors peut-être qu’il n’y a rien à regretter.

Vassili Andreïev aime beaucoup sa petite fille. Il l’exhibe comme un joyau aux grands de la bonne société. Tous se pâment d’admiration pour ses beaux cheveux blonds et ses grands yeux bleus. Vassili lui a acheté une belle paire de lunettes qu’elle chérit chaque jour. Elle, elle s’ennuie à mourir. Ce monde n’est pas fait pour elle. Alors elle se prend à rester dans un coin, seule, avec son petit air guindé d’aristocrate miniature. Et elle regarde. Elle observe. Chaque pli soucieux sur le front, chaque ridule esquissée, chaque phalange crispée. Elle passe au crible des personnes prises au hasard. Son papa lui reproche, un jour, ses regards insistants.

Oksana se souvient de ce jour. Elle a tout juste dix ans. Elle part en classe de mer avec ses amis. La splendeur des falaises domine les vagues acharnées contre ses parois ancestrales. Le soleil bat de ses rayons le petit groupe bien protégé par de petits chapeaux jaunes. Surtout ne vous approchez pas de trop près, surtout restez ensemble. Oksana, elle, veut s’approcher. Elle glisse sur une parcelle trop humide. Tombe. Trop terrifiée pour hurler, son cri d’adieu reste enfoncé dans sa gorge. Elle ferme les yeux très fort, elle espère que ça ne va pas faire mal. Alors son corps se disloque et elle s’envole. Une dizaine d’oisillons, de la taille d’un poing de bébé, viennent s’échouer auprès de ses camarades effrayés. Pour reformer avec lenteur et maladresse le corps infantile.

Oksana se souvient des regards inquisiteurs, des murmures abjects. Elle se souvient que personne n’est venu l’aider, ce jour-là. Elle se souvient du maelström de ses pensées, beaucoup trop grand pour une petite fille : peur, douleur, solitude, incompréhension… Les étoiles, pour elle, sont des chimères jusqu’à ce fameux jour.

Depuis, Vassili lui a expliqué. Il a dû la désinscrire de l’école pour lui faire suivre des cours particuliers, prenant soin d’acheter le silence des autres. Son papa l’a toujours acceptée, lui. Il connaît sa nature depuis le jour où elle est tombée là, dans le jardin de son ancienne villa. Ils déménagent en ville, plus près du siège de Drake Industry. Là-bas, elle suit des cours particuliers. Toujours enfermée dans l’immense appartement, avec interdiction de sortir sans garde du corps. Pourtant Oksana rêve de liberté. Elle rêve de pouvoir, de nouveau, appréhender la vie de ses grands yeux bleus. Bientôt, ce rêve se transforme en rancœur étouffée. Alors qu’elle entre à peine dans l’adolescence, elle se replie sur ses idéaux à peine naissants. Oksana veut exister sans entraves. Elle veut être reconnue. Et, surtout, elle veut se débarrasser de ce lien inconnu qu’on lui impose. Cela lui fait peur : et s’il mourait demain ?

Il y a cette courte période dont Oksana ne veut pas se souvenir. Elle a quinze ans. Ce moment où Vassili, de toute bonne foi, a voulu l’emmener chez des médecins pour qu’ils s’occupent d’elle et l’aident avec son pouvoir. Elle se souvient des marques, des expériences. Des moments où elle a dû rester dans une petite cage sous sa forme d’oiseaux : les grilles étaient si minces qu’elle ne pouvait rien voir au dehors. Elle n’en parle pas, à l’époque. Elle veut que ce soit lui qui s’en rende compte, pour regretter son geste d’autant plus. Elle le déteste. Tout cela dure deux ans. Maintenant, leurs relations restent cordiales mais… il y a toujours cette blessure qui demeure. Cette nervosité quand elle croise une blouse blanche.

Elle se souvient de ces longs mois où aucun mot n’est sorti de sa bouche. Oksana passe sa vie à étudier : ouvrages de philosophie et de sociologie encombrent son chevet. Elle s’intéresse de près aux combats contre les discriminations. À toutes ces figures charismatiques  qui se sont battues pour obtenir justice. C’est là que germe dans son esprit une idée, une ambition : plus tard, elle sera politique. Elle se battra pour les droits des étoiles. Oksana décide alors de se réconcilier avec son père ; elle veut son appui, surtout financier. Après deux ans de mutisme, elle lui demande avec ferveur de revenir au monde. À dix-neuf ans, elle part étudier à l’étranger. Là-bas, elle découvre son homosexualité, en même temps que son incapacité à se faire des amis – le résultat de neuf ans d’enfermement. Elle se cache dans sa froideur hautaine et calculatrice, dans ses bonnes notes et ses pensées.
Hoshikami l’accueille de nouveau après sept ans d’études. Passionnée de lettres, Oksana est devenue écrivaine. Pourtant, aucune maison d’édition ne l’accepte : ils craignent ses écrits révoltés. L’autocensure lui est insupportable : elle passe par Internet, en s’autopubliant sous un pseudonyme. Oksana se souvient pourtant du jour où la police a débarqué chez elle : on l’a dénoncée. Elle voit son œuvre détruite… mais elle sait que, quelque part, les hackers ont déjà fait leur travail. Placée sous surveillance, elle use de son pouvoir pour échapper à l’œil corrompu des autorités. Oksana se souvient de sa méfiance quasi-paranoïaque Elle se souvient des longs jours passés en compagnie des mouettes, à écrire.

Plus tard, elle sera contactée par les crépusculaires : elle refusera leurs avances. Elle ne veut pas se salir les mains pour la cause. Au contraire, le groupe politique formé par Akinobu Eiko l’intéresse davantage : elle entre au parti en secret, jusqu’à son dévoilement au crépuscule de l’année 2015. Oksana espère que les prochains jours seront mémorables.